La femme indienne, le viol et la loi.

Mon article pour Les piplettes poilues – La femme indienne, le viol et la loi.

Après un article de M.C.  sur la situation des femmes en Chine et un de E. sur le Liban, nous avons le plaisir de publier un article d’ E.S., envoyée spéciale en Inde.

Son blog  sur l’Inde : https://uneetoiledanslavallee.wordpress.com/

La femme indienne, c’est la femme entreprenante, courageuse et indépendante affichée sur les murs du Petit Palais de Paris en octobre 2011. C’est ma colocataire, 20 ans, libre, riche et cool, qui sort tous les soirs en boîte ou dans des bars en minijupe. C’est aussi la jeune inconnue en kurta-salwar-dupatta (tunique-pantalon bouffant-écharpe qui cache le décolleté) qui t’arrêtes dans la rue pour t’expliquer que porter une robe (aux genoux) sans collant c’est mal. Et la femme indienne, c’est aussi Jyoti Singh Panday, 23 ans, décédée des suites du viol collectif dont elle a été victime le 16 décembre 2012, dans un bus à New Delhi.

Oui, voilà, le viol collectif dans…

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2013

7 Janvier 2013 (heure indienne).

Plusieurs constats s’imposent :

– cela fait bientôt 6 mois que je suis en Inde ;
– cela fait trop longtemps que je n’ai pas publié sur ce blog. Je vous offre donc comme promis la fin du petit jeu Inde ou Thaïlande avec les articles 4 et 5 de la série. Les réponses aux trois premières séries ont été publiées par mes soins dans les commentaires. Je donnerai les réponses à ces deux nouvelles séries d’ici mercredi, avec les extraits du carnet thaïlandais promis ;
– Ma famille est venue, a vu, a vaincu (la plupart du temps) et est désormais repartie, me laissant en tête à tête avec 2000 photos à trier. Je ne pense pas faire le récit de mes voyages pour le moment, on verra ceux dont je parle au fur et à mesure de mon inspiration.

Je n’ai pas l’habitude de m’attarder directement sur l’actualité indienne mais un événement retient l’attention, et je ne voulais pas commencer 2013 sans en dire un mot. Il s’agit comme vous l’aurez sans doute deviné du viol collectif dont a été victime une indienne de 23 ans pendant une triste nuit de New Delhi à la fin de l’année 2012. Sans revenir sur les sordides détails de l’histoire (les journalistes indiens, voire du monde entier font cela bien mieux que moi), j’aimerais m’attarder sur les réactions provoquées par cette (sordide) histoire. Trois choses m’interpellent :
– La première est peut-être la plus triste, mais je ne comprends pas vraiment pourquoi ce cas-là « choque » plus que les autres. Tant mieux si les Indiens se rendent compte qu’il y a un vrai problème avec la sécurité des femmes, à fortiori à New Delhi, particulièrement la nuit, mais enfin, ça n’est pas nouveau (malheureusement). Mon colocataire qui a accès régulièrement à la presse indienne me rapporte régulièrement des cas de violences sexuelles / de viols ayant eu lieu à Delhi. Dommage qu’il ait fallu attendre cette nouvelle histoire pour une remise en question de la société indienne telle que celle qui semble se profiler.
– Nous avons maintenant une histoire sordide avec une victime très victime et des méchants très méchants ; parfait pour une condamnation sans appel du crime qui a été commis et pour un questionnement en profondeur. Le seul léger hic à mon goût, ce sont les appels à la mise à mort, éventuellement par pendaison, éventuellement par lapidation, éventuellement également pour le mineur inculpé, le tout pour « rétablir la justice » et « donner l’exemple ». Pour plus de raisons solides et réfléchies, lisez n’importe quels commentaires de n’importe quel article traitant le sujet dans n’importe quel journal indien. Cela n’est pas sans me rappeler certaines réactions de mes compatriotes post-affaire Mera (mais si, le Toulousain qui avait tué des gosses juifs à la sortie de l’école). Ce dernier était mort, mais certains Français avaient tout de même mis sur la table la question de la peine de mort pour les tueurs d’enfants (on retrouve le cas de figure : un méchant très méchant, une victime très victime et une opinion publique unanime). Dans un cas comme dans l’autre, je ne cherche en aucun cas à atténuer la culpabilité des coupables ni à nier la gravité de leur crime ; mais cela est-il vraiment établir une « justice juste », équitable et humaine que de rétablir la peine de mort (ou dans le cas de l’Inde, d’appliquer ce châtiment, qui n’est pas aboli même si rarement appliqué) ? Je ne veux pas lancer un débat là-dessus sur ce blog (quoique pourquoi pas) mais en gros, je ne pense pas que la peine de mort ait/aurait eu un effet dissuasif dans ces deux affaires (est-ce que les individus constituant un groupe de violeurs s’intéressent vraiment aux sanctions qu’ils encourent lorsqu’ils s’attaquent à une fille dans un bus ?).
Last but not least comme dirait nos amis anglophones, j’ai été attristée d’entendre une de mes amies indiennes me dire qu’on pouvait se voir prochainement, mais en journée seulement, et qu’elle devait rentrer tôt parce qu’elle avait peur de toute cette histoire. J’espère que les femmes de New Delhi, étudiantes, travailleuses, mères, filles et soeurs vont utiliser cette histoire pour se battre pour le droit qu’elles devraient toutes avoir : celui d’être et de se savoir en sécurité n’importe où dans leur ville à n’importe quelle heure, au lieu de tomber dans le cycle vicieux de la peur et de la culpabilité inversée (les femmes ne sont pas en sécurité la nuit donc je ne sors pas la nuit donc une femme qui sort la nuit enfreint la règle tacite donc s’il lui arrive quelque chose c’est de sa faute, car elle savait que c’était dangereux). J’espère que la mort injuste de cette indienne ne sera pas vaine et que les condoléances que nous lui adressons toutes et tous sont les prémisses d’un changement qui me permettra de dire un jour « être une femme à New Delhi ? Oui et alors? ».

Sur ces paroles un peu sérieuses, j’espère ne pas vous avoir enlevé tout entrain et toute fierté d’avoir survécu à la prétendue fin du monde. Vous pouvez, si vous le souhaitez, réagir dans les commentaires prévus à cet effet.

4 mois – Première échographie

Préface informative: je ne suis pas enceinte, le titre de cet article est purement métaphorique, c’est mon style d’auteure lyrique qui ressort, au détriment des âmes inquiètes qui me lisent en diagonale.

La première échographie a traditionnellement lieu avant les quatre mois de grossessse. Pourtant, pour ce bébé 3A* qui grossit en moi, il fallait attendre le bon moment avant la première introspection. En l’occurrence, le 20 novembre dernier, 4 mois pile après avoir posé mes pieds pour la première fois sur le sol indien, je me trouvais à nouveau à l’aéroport de New Delhi à nouveau, prête à quitter pour la première fois le territoire indien qui m’avait (plus ou moins) chaleureusement accueillie.

Ce fut donc un moment propice au bilan. Change-t-on au bout de quatre mois de troisième année à l’étranger, à fortiori en Inde ? J’ai l’impression d’être toujours moi-même, de ne pas me trahir au quotidien. Cependant, certains de nos repères, certaines de nos valeurs ont incontestablement changé-e-s. Ce que nous trouvions sale à l’époque passe aujourd’hui pour « ah ça va, on peut y aller ». Ce que nous trouvions plutôt conservateur en France passe pour relativement moderne, ce que nous trouvions peuplé nous paraît aujourd’hui vide, « bruyant? », « mais non, c’est calme ici! ». Là où l’on place la normalité, incontestablement, ce curseur est différent. Cela nous paraît normal d’attendre, de galérer parfois, de ne pas toujours être comprise(s). Cela nous parait normal de devoir rentrer le soir avant minuit, de manger végétarien, de s’habiller (trèèès) décemment, de tomber malade de temps à autre, de secouer la tête pour un oui ou pour un non ou de voyager avec des gens que l’on connait à peine.

Assise sur un siège de l’Indira Gandhi International Aéroport, la première chose qui me frappe c’est la propreté. Wahou, même la moquette ultrakitsch de l’aéroport est super bien entretenue.  Quand on voit ce qu’ils font de leurs hôtels en Inde, on réalise à quel point c’est incroyable.

Dans quelques heures, je serai en Thaïlande. Et c’est en remarquant le pincement au ventre qui m’accompagne à la sortie du territoire indien que je réalise à quel point le retour en France sera difficile. L’accent indien, ou plutôt l’intonation indienne en Anglais, j’ai fini par m’y faire – et par l’adopter. Ce terrain si inhospitalier au premier abord; j’ai fini par m’y sentir chez moi, par en connaitre les codes et par savoir en jouer. L’Inde va me manquer, c’est certain, et je vais devoir pour compenser, jouir des libertés que la Thaïlande saura m’offrir. Comptez sur moi.

PS : J’essaye habituellement de tenir très régulièrement ce blog, mais les circontances du voyage font que ce sera certainement bien plus aléatoire pendant la fin du mois de novembre et le mois de décembre. J’espère que vous m’excuserez.

* rappel : 3A, c’est pour 3ème Année de Sciences Po, c’est-à-dire, l’année que nous passons tous à l’étranger.

Dialogue – « G like Gôlf? »

Une soirée d’août, vers 21h, Chittaranjan Park, température 30°C, légère brise.

Sur un toit aménagé en terrasse, deux Françaises et deux Indiens décident de boire une petite bière pour célébrer la nuit. Se pose alors la question : Où et comment acheter des bières à New Delhi ? Dans cette ville où il est interdit de boire dans la rue, où certains bars prohibent l’alcool aux moins de 25 ans (quand ils ne le prohibent pas tout court), et où il n’y a pas de rayon alcool dans les supermarchés (d’ailleurs, il n’y a pas vraiment de supermarchés), ce n’est pas si évident.
Heureusement, il existe des livreurs joignables par téléphone qui vous amènent votre bière chez vous moyennant 80 Roupies (environ 1€20) et une bonne heure.


Coup de fil :

(M.) : Hello Sir, I would like to order some beers.
(Le vendeur de bières) : Ok, where do you live ?
(M.) : CR Park, G block.
(Le vendeur de bières) :  G… Like Gôôôlf ?
(M.) : Euh… Yes, G like Golf.
(Le vendeur de bières) : Ok. Which beer would you like ?
(M.) : What do you have ?
(Le vendeur de bières) : Kingfisher or Heineken.
(M.) : Ok, let’s take some bottles of Heineken.
(Le vendeur de bières) : Bottles ?
(M.) : Yes. Don’t you have ?
(Le vendeur de bières) : I have some, but not that much.
(M.) : Not that much ? Ok, we just need five.
(Le vendeur de bières) : Ok.

Après s’être posés deux questions : Pourquoi le premier truc auquel pense un vendeur de bière indien qui répond au téléphone est le Golf (sport très peu répandu en Inde pour info) ? et Combien de bières avait-il en réserve pour nous annoncer « not that much » ? avoir patienté 1h, et rappelé une fois pour demander où ça en était, on a enfin pu déguster nos bières tranquilles en observant les chauves-souris.

Ps : Le site en question s’appelle delhi.burrp.com… Charmant !

Inde, J+2 – Des dernières fois aux premières

En deux jours, il se passe généralement beaucoup de choses.

Les 17 et 18 juillet derniers, que j’en ai conscience ou non, un certain nombre de gestes du quotidien sont devenus « la dernière fois que… »*

La dernière fois que je mange du roquefort, la dernière fois que je bois de l’eau du robinet (à ce propos, je remercie le groupe Odelaf, qui a eu la gentillesse de me dédicacer un morceau de leur chanson, faut chercher par là, autour de 1mn45), la dernière fois que je vois ___, ____, ______, _______, _______ ou encore _____-________ (mais oui, vous allez bien trouver un endroit ou caser votre nom, moi je dois trouver de la place dans mon coeur et dans ma tête c’est encore plus dur), la dernière fois que je prends une douche à l’eau chaude (apparemment), la dernière fois que je mets un maxi-décolleté sans en avoir rien à foutre, la dernière fois que je comprends tout ce qui se passe autour de moi.
Beaucoup de choses auxquelles on renonce. Et si on y renonce de manière aussi délibérée (ou presque) et volontaire (on écrit même des lettres de motivation pour ça!), c’est bien parce qu’on s’attend à des bonnes aventures quelque part.

Et en deux jours, ces 20 et 21 juillet 2012, il y en a eu des aventures ! Les premières fois furent aussi nombreuses que les dernières. Cela mérite un petit panel des premières expériences :

Se déplacer d’un point A à un point B

Delhi’s map

En deux jours, je n’ai pour l’instant testé que trois moyens de locomotions parmi la multitude qu’une ville comme Delhi propose (il ne manque plus que le tapis volant). Le taxi, pour aller de l’aéroport à l’hostel, c’était assez épique. Des amis de ma maman l’ayant stressée, elle avait j’avais un tas d’appréhensions à ce sujet. Au final, tout s’est bien passé, je vérifiais qu’il n’allait pas à l’autre bout de Delhi sur une carte récupérée à l’aéroport et regardait le monde extérieur, en regrettant le manque de ceinture de sécurité. Dans ce coin de Delhi, la circulation n’est pas si dense (en comparaison avec mes souvenirs du Viet-nam) et la vitesse pas si élevée. De là à dire qu’il y a un code de la route faut pas non plus exagérer.
La première fois en Rickshaw, c’était plus épique. Renseignée à la réception de l’hostel sur le prix de la course et sur le temps (100 Roupies – 30 à 40 min) que cela prendrait jusqu’à Old Delhi, j’ai envoyé chié le conducteur de rickshaw qui me proposait de me conduire au métro pour 50 Rps (à environ 800m). Au final, je m’en suis sortie pour 120Rps (environ 2€). Arnaquée, mais pas trop… L’avantage du rickshaw, c’est de pouvoir observer Delhi et les gens autour – moment de fou rire avec mon conducteur quand il a fait un geste équivoque à l’espèce d’homme d’affaire sur son scooter qui klaxonnait comme un barge au feu rouge. Première confrontation à la mendicité et à la vente de noix de coco (toujours ces feux rouges semés d’embûches).
Enfin, le troisième moyen de transport testé pour le moment, immémorial, ces fidèles pieds. Aujourd’hui, pour déambuler dans l’Old Delhi, on peut dire qu’ils m’ont rendu un fier service.

Et demain, je teste le métro.

Se nourrir sans peurs et sans reproches

J’avais décidé d’être gentille avec mon corps et de ne pas lui imposer le même jour décalage horaire + fatigue + chaleur + nourriture étrange et super-épicée. J’ai donc opté pour du soft le premier jour (il est même possible d’acheter du pain de mie en Inde). Mais aujourd’hui, après m’être levée trop tard pour le petit-dej’ indien de mon hostel, j’ai décidé d’enfin me mettre à la bouffe indienne.

Fast food végétarien avec Butter nan, tofu en sauce (au milieu), riz et autres délices épicés.

Premiers « butternaan » (espèce de galette de farine beurrée à tomber par terre), premières épices (et encore, on demande du « noooot spicy pliz, verrrry soft »), premier repas 100% végétarien et premier test d’une adresse du Routard, notre vaillant compagnon. Je ne dirai peut-être pas ça dans 2 jours (si malade) ou dans 2 mois (quand l’excitation des premières fois sera passée) mais pour l’instant, ça me plait beaucoup ! Sans même parler de l’aspect financier – 2 à 3€ par personne…
Pour l’eau c’est plus compliqué. J’ai utilisé ma première pastille de micropure et je vais boire cette eau ce soir, je vous dirai si c’est fiable ou non dans 2 jours…

J’espère me réveiller assez tôt demain pour inaugurer mon premier petit-dej indien ! Pour cela, il va falloir écourter un peu, mais imaginez bien que j’ai fait beaucoup d’autres choses (j’essaierai de fournir encore plus de photos prochainement).

Et il y a d’autres premières fois à venir qui risquent de s’avérer incroyable :

– le premier repas dans une famille indienne (prévu demain midi ou soir)
– la première conversation en Hindi (prévu… pas pour tout de suite)
– les premiers vêtements indiens que je vais acheter (prévu pour bientôt)
– les premiers amis indiens (ça ne saurait tarder)

Come on guys, it’s gonna be INCREDIBLE, it’s gonna be INDIA !

Old Delhi

* lorsque je parle de dernière fois tout au long de cet article, ce n’est pas, je l’espère, la dernière fois de ma vie, mais seulement la dernière fois avant une année entière loin de chez moi.